JEFF HEALEY: Heal My Soul (2016 – Provogue)

Non, on ne rêve pas ! Il s’agit bien d’un nouveau disque authentique du génial guitariste trop tôt disparu, une véritable « galette perdue ». Jeff enregistrait tellement de morceaux à chaque parution d’album qu’il ne pouvait jamais tous les caser dessus et les voici donc réunis avec la bénédiction du Jeff Healey Estate. Que tout le monde se rassure, il n’est pas question ici de chutes de bandes retrouvées dans une poubelle ou de démos approximatives et mal mixées (où l’on entend une chaise qui grince, le preneur de son qui baille ou un technicien qui pète). On peut apprécier des titres vraiment aboutis qui ne laissent planer aucun doute sur le talent et la maîtrise technique du regretté Jeff. D’entrée de jeu, le blues-rock costaud « Daze of the night » donne le ton avec un riff en béton, un refrain aux accords bien trouvés et un solo hallucinant. Et toujours ce son de folie et cette dextérité incroyable comme en témoigne le final avec la seule guitare de Jeff. Tout est dit ! On peut alors profiter sans crainte du reste de l’album qui nous dévoile les diverses facettes de l’artiste. Du blues-rock mid tempo (« Moodswing ») au gros rock qui fait mal («Please» sous influence Jimi Hendrix avec une guitare wah wah démentielle), en passant par le blues-rock syncopé (« Put the shoe on the other foot » et son solo magistral), les amateurs de six-cordes seront à la fête. Jeff laisse aussi parler sa sensibilité avec les très belles ballades « Baby blue » (et son superbe solo) et « All the saints » (sur laquelle ne figure aucun solo mais seulement des guitares acoustiques). Il reprend également la recette de la pop song de qualité déjà expérimentée sur son premier album (« River of no return » ou « That’s what they say ») avec les quatre titres suivants : « I misunderstood » (avec plein de sons de guitare différents et un solo typique de Jeff mélangeant feeling et technique ainsi qu’une haute précision dans les tirés de cordes), « Love in her eyes », « Kiss the ground you walk on » (avec une montée d’accords originale sur le refrain et un solo d’anthologie) et « It’s the last time » (sur ce titre, la guitare est un vrai régal). De quoi satisfaire les oreilles mélomanes. Voici donc un bien beau témoignage sonore de la virtuosité et du talent du grand Jeff. Un disque qui nous replonge dans un passé glorieux mais qui nous fait encore plus regretter la disparition de cet artiste hors du commun. I can see the light.

Olivier Aubry